Le 25 février 2019, les bulldozers ont commencé à casser des maisons des familles concernées par la récupération du site de Kaporo rails, Kipé 2 et Dimesse. C’était sous le règne d’Alpha Condé. Trois ans après ces tristes événements, les victimes célèbrent ces moments de rappel pour elles. Une cérémonie a été organisée ce samedi, 26 février 2022, à cet effet sur le site déguerpit. C’était en présence de plusieurs invités de marque, notamment le Conseiller du président de la Transition à la personne de Thierno Mamadou Bah à qui d’ailleurs les victimes ont remis la lettre ouverte qu’elles ont adressée au colonel Mamadi DOUMBOUYA.
C’est la présidente des femmes du collectif des victimes de déguerpissement qui a lu la déclaration. Makia Touré a fait lecture du contenu de la lettre ouverte adressée au président de la transition.
« Monsieur le Président, le 05 septembre 2021, vous et vos hommes avez mis fin à la dictature imposée par Monsieur Alpha Condé. Cette action libératrice a été saluée par la majorité de la population. Votre discours dans lequel vous avez déclaré que ‘la justice sera votre boussole’ a remis de l’espoir dans les cœurs. En outre, vous avez marqué les esprits en vous recueillant au cimetière de Bambéto et au stade du 28 septembre pour honorer la mémoire de certains de nos martyrs. Tout ceci rentre dans le cadre de la réconciliation nationale. C’est à ce titre, Monsieur le Président que les victimes de Kaporo rails, Kipé 2 et Dimesse, attendent elles aussi que vous manifestiez la même compassion à leur égard. Savez-vous Excellence que nos maisons ont été détruites par Ibrahima Kourouma sur ordre d’Alpha Condé en violation flagrante de nos droits reconnus et protégés par toute la législation en vigueur dont le code foncier et domanial de la Guinée ? Savez-vous que nous avons été spoliés et expropriés pour cause d’utilité publique ? Monsieur le Président de la République, l’État ne dispose d’aucun document de propriété de nos terres à part le décret 211 du 23 novembre 1989. Mais, même ce document stipule en son article « 4 », les occupants de ces zones seront déguerpis au fur et à mesure des besoins d’aménagement de la puissance publique ;
Ces occupants qui auraient mis en valeur leurs fonds avant la date du 20 avril 1988, ci-dessus indiquée ne sont déguerpis que si l’État s’engage à les recaser et à les indemniser de la valeur de leurs réalisations sur les fonds. Pourtant c’est le contraire qui a été fait. Nos droits ont été violés ! Près de 2500 bâtiments furent démolis et plus de 1200 familles jetées dans la rue ! 3000 enfants ont été privés d’éducation ! Bref, nous avons été transformés en réfugiés dans notre propre pays.
Monsieur le Président, cette situation dure depuis maintenant trois ans. Les personnes les plus âgées parmi nous sont en train de mourir. Les jeunes ayant perdu tout espoir de jettent à l’assaut du Sahara et de la Méditerranée dans l’ultime but de rejoindre l’Europe.
Monsieur le Président, comme vous avez affirmé que vous êtes venus rectifier les erreurs du passé, il est de votre responsabilité de rétablir les victimes de Kaporo rails, Kipé 2 et Dimesse dans leurs droits. Pendant que le pouvoir d’Alpha Condé nous appauvrissait, il enrichissait des étrangers regroupés au sein de la société IMAAG-HOLDING chargée de céder nos terres à des multinationales et d’autres groupes mafieux.
Monsieur le Président de la République, depuis le 05 septembre, le collectif des victimes de déguerpissement de Kaporo rails, Kipé 2 et Dimesse 2019 vous a adressé trois demandes d’audience et un mémorandum (qui décrit la destruction de ces localités). Ces écrits sont restés sans suite.
Monsieur le Président, à la lecture de tout ce qui a été énoncé ici, vous comprendrez sans nul doute notre peine. Comme vous l’avez fait avec la famille du président Sékou Touré, vous pouvez aussi rendre justice aux populations victimes de Kaporo rails, Kipé 2 et Dimesse.
Vous en souhaitant bonne réception de la présente, nous vous prions Excellence Monsieur le Président, de recevoir nos salutations distinguées », tel est le contenu de la lettre adressée au président de la transition. »